Découvrez l’association Equipe de Secours Animalier en Montagne (ESAM) et les drones

J’ai contacté Arnaud Lemagny, le président de l’association Equipe de Secours Animalier en Montagne (ESAM) suite à un message posté sur les réseaux sociaux pour trouver des exploitants de drones.
Il m’a décrit longuement et avec passion son association, voici ce que nous avons échangé…
Les missions de l’ESAM…
Helicomicro : Raconte moi l’histoire de l’association Equipe de Secours Animalier en Montagne !
Arnaud Lemagny : C’est une association qu’on a créée il y a 5 ans, fin 2019. On a lancé cette association parce qu’on s’est retrouvés à essayer de récupérer des chiens qui étaient coincés en Chartreuse. On s’est rendus compte qu’il n’y avait rien d’organisé ni de structuré pour secourir les animaux qui étaient coincés comme ça en montagne.
HM : Combien étiez-vous aux débuts de l’association ?AL : Je suis le président de l’association, on l’a créée avec un copain étudiant vétérinaire à l’époque et deux cordistes. On pensait faire des interventions 3 à 4 fois par an. En fait ça a pris beaucoup d’ampleur très rapidement, nous n’avions pas conscience du besoin qu’il y avait sur le département. La première année, on a fait 38 secours. En 2024, on en a fait 73 !
HM : Et en 2025, il y a combien de personnes dans l’association ?
AL : Nous sommes désormais une quarantaine. Mais nous sommes environ une quinzaine de membres réellement actifs.
HM : Vous restez dans l’Isère ?
AL : On va de plus en plus loin, parce que bien que les départements voisins aient la possibilité d’intervenir sur des animaux qui sont coincés, ils n’ont pas forcément les effectifs disponibles pour le faire en permanence, ils priorisent légitimement le secours à personne.
HM : Ce sont plutôt des animaux appartenant à des particuliers, des agriculteurs, des chasseurs ?
AL : Il y a un peu de tout. Les principaux animaux qu’on récupère, ce sont des chiens de chasse, c’est le gros de l’activité de l’association. Il y a aussi des chiens de randonneurs, il y a aussi des animaux d’élevage. L’activité alpages en été est assez importante, elle demande des compétences qui sont différentes.
HM : Et les animaux sauvages ?AL : Cela arrive parfois. En fait, on a des amis dans des centres de soins qui s’occupent de réhabiliter des animaux blessés. De temps en temps, ils nous appellent parce qu’ils savent qu’on est équipés pour la capture d’animaux.
HM : Il faut des compétences pour capturer des animaux sauvages ?
AL : Oui, on a plusieurs vétérinaires dans l’association, donc on peut faire de la téléanesthésie. Nous disposons de deux fusils hypodermiques, ça nous permet de capturer des animaux, et c’est une compétence qui n’est pas forcément toujours évidente à trouver. Pour l’anecdote, on a récupéré un lama plusieurs fois en Chartreuse !
HM : Oh, c’était toujours le même ?AL : Oui, c’était toujours le même ! On y est allés une première fois, on n’a pas réussi à l’avoir parce les lamas, c’est très compliqué à endormir. Il faut plus d’anesthésiant que pour endormir un cheval ! alors qu’un lama ça fait à peu près 150 à 180 kg et qu’un cheval c’est plutôt dans les 400 kg. La première fois ça n’a pas marché. Quand on y est retourné ça a très bien marché, on l’a récupéré, on l’a héliporté. Puis trois semaines après il s’est à nouveau sauvé, il a fallu retourner le rechercher au même endroit !
HM : Il y a d’autres missions exotiques comme celles-ci ?
AL : Ca arrive. Il y a un an et demi, on a récupéré un wallaby à Chasse-sur-Rhône ! Mais le plus souvent, ce sont des renards, des blaireaux, des chevreuils.
HM : Les sauvetages sont-ils facturés par l’association ?AL : On a plusieurs modes de fonctionnement. Les moyens qu’on va mettre en œuvre pour récupérer un animal coincé en montagne ne seront pas facturés, à part l’hélicoptère parce que les vols chiffrent très vite et qu’on est obligés de passer par des sociétés privées. Nos interventions sont gratuites, et on appelle à chaque fois à la générosité des propriétaires. Par ailleurs, tout au long de l’année, on fait des campagnes, on rappelle aux gens qu’on vit des dons. Il y a une petite partie annexe qui est l’utilisation des compétences de l’association en dehors des secours en montagne. Par exemple un éleveur qui nous appelle parce qu’il n’arrive pas à attraper une vache dans son champ. Le vétérinaire va facturer ses produits, et puis l’association va facturer aussi la capture, c’est-à-dire l’acte de faire la téléanesthésie.
HM : Vous vous aidez souvent de vols en drone ?AL : Oui, lorsqu’on sait qu’il y a un animal qui est coincé, que ça va déclencher un secours une fois qu’on l’aura retrouvé. La mission drone fait vraiment partie du secours en montagne.
HM : Une caméra thermique est-elle indispensable ?
AL : Quand on recherche un animal supposément vivant, c’est plus efficace. Mais ce n’est pas indispensable. On procède à une analyse du terrain, des faisceaux d’indices que sont les aboiements, les traces de colliers GPS, le relief. Notre expérience nous permet de mieux estimer et resserrer la zone de recherche. Et donc on peut parvenir à un résultat avec une caméra non thermique. A vrai dire, on est souvent confrontés à des personnes qui imaginent qu’un drone va retrouver leur chien perdu en montagne sans trop savoir où chercher, tout simplement parce qu’ils supposent qu’avec un drone équipé d’une caméra thermique, on voit tout.
HM : Que faites-vous dans ce cas ?AL : On essaie de ramener les personnes à la réalité, leur expliquer que la recherche avec un drone ne donnera probablement rien de plus. Parfois ces personnes ont besoin de se dire qu’ils ont tout essayé. Donc on facture les vols en drone. Ca nous a permis d’acquérir un DJI M30T. Il faut dire qu’avec environ 30.000 € de budget sur l’année pour l’association, le coût d’un M30T est très significatif.
HM : Qui peut piloter le M30T dans l’association ?
AL : A ce jour, nous sommes 3 télépilotes. Moi, j’ai une qualification OPEN.A2, c’est le minimum qu’on demande même si en pratique, on évolue plus en sous-catégorie A3 parce qu’on est toujours loin des gens et qu’on a un drone qui fait moins de 25 kg. Et comme il fait moins de 4 kg, on peut prétendre au A2. Les deux autres sont d’anciens télépilotes professionnels.
HM : Est-ce que vous avez besoin d’autres pilotes et d’autres machines ?
AL: Au niveau des pilotes de l’association, c’est toujours bien d’en avoir parce qu’on est tous bénévoles. Plus on a de pilotes, plus on a de chances d’être disponibles rapidement. On a aussi besoin de bien les connaitre. Mais on recherche d’autres télépilotes…
HM : C’est le sens d’une publication récente de l’association sur les réseaux sociaux ?AL : Absolument ! Ce qu’on voudrait, c’est disposer d’un annuaire de télépilotes vers qui envoyer les propriétaires d’animaux perdus qui nous appellent, parce que nous on n’avons pas le temps de traiter toutes les demandes, ni de nous déplacer en France. Je précise d’ailleurs que notre recherche de télépilotes est nationale ! Nous avons des demandes d’un peu partout en France, par exemple récemment dans les Vosges pour retrouver des rennes.
HM : Pour résumer, c’est une mise en relation ?AL : C’est ça. Par exemple, j’ai reçu il y a peu un appel d’une dame qui a perdu son chien il y a un mois. Avec une équipe à pied, c’est long et difficile. On peut envisager le drone dans ce contexte, dans le cadre d’une mission rémunérée par le propriétaire. Ce n’est pas notre vocation, et c’est le gagne-pain de télépilotes. Pour être clair, c’est vraiment une mise en relation, pas un appel à télépilotes pour opérer le drone de l’association ni réaliser bénévolement des vols de secours. On a constaté que les clients potentiels de missions en drone avaient du mal à trouver des prestataires en mesure de répondre à leur attentes. On désire aussi être prudents dans notre mise en relation, le but n’est pas que des télépilotes mal intentionnés tentent de profiter de la détresse de personnes qui ont perdu un animal.
Pour soutenir l’association Equipe de Secours Animalier en Montagne, ça se passe ici : il est possible de faire un don unique, ou de manière récurrente !
La page officielle de l’association est là, et la page Facebook ici, vous trouverez sur les deux des récits de missions de l’ESAM !
Le numéro d’urgence de l’EASM est le 04 76 52 62 16.